Composer avec l' absence

[Filae77]

(Dans un roman connu, un maillon disparaît.) *

Sans toi j'ai du grandir; mais voilà qu'aujourd'hui,

ton amour qui m' a fui n'a plus aucun attrait;

car du vrai ou du faux moi aussi j' ai choisi. 

 

Quand au bout du chagrin, on comptait sur l' oubli,

l' abandon s' y trouvait, par un vil coup du sort !   

Si un pardon pouvait nous offrir un sursis,

saurait-il m' affranchir d' un pouls qui bat trop fort?   

 

Si la mort grimaçait, nous lui faisions faux bond.

A bord d'un chariot fou, nous tracions un parcours

marginal, impulsif.  Surtout fuir la maison !

J'ai vu dans un tarot s' accomplir nos amours. 

 

Sans minimum vital j' ai pourtant tout construis.

Lui qui nous voit souffrir ignorait mon combat.

Pour ma consolation, partir loin nous instruit.

Qui sait où nous allons ? Tant pis, on survivra.

 

 

Un flot bruyant d' autos grondait au point du jour.

Ainsi qu' un long sanglot, il bruinait sur Paris.

Au crachin lancinant qui noyait nos faubourgs,

Nous opposions la foi; adoration sans bruit. 

       

 

Pourquoi vouloir ici qu'un chainon primordial

brillât par omission ?   y offrir ma vision:    

'Là où un propos clair, paraîtrait trop banal,                                 

d'un mot ou d'un non dit naitrait la confusion.' 

 

 

 *la disparition de Georges Perec