Posté(e) 5 mars Atome par atome, le décor change. Le gel devient fragile, la glace crème, une haleine tiède et c’est toute une Laponie qui renouvèle sa parure, comme éclose de son écale blanche et rigide. La Terre s’anime. C’est presque imperceptible, fait de mille et une nuances, et pourtant – écho d’un volcan – se soulève le printemps. Le printemps qui craque, pousse, travaille, s’érige, s’emmoite, circule, s’ensève, fouille. Le printemps qui s’inhale, s’oit, se durcit, bientôt se contemple, se savoure déjà. Par la campagne où il s’épand, la montagne dont il lèche les flancs, mais aussi, à cent lieues de l’océan, l’air est déjà pris aux cheveux par une très subtile fragrance d’iode. Pourtant, cette révolution : mille et une fois vécue ! Notre peau la rejoue, se lisse comme les bancs de sable où se glisse, par-dessous, la mer reprenant possession de l’estran. Le vent qui souffle promène des petits wagons de vapeur, nuages emplis de promesses estivales et les arbres se couvrent de bourgeons, éruptions des mille feux couvés par la nature. Orages et giboulées à venir : comme des ablutions de bienfaisance ! Aussi le renouveau est-il résurrection : le corps est une mémoire de baromètre, sa musique ne dévie pas de la partition. L’envie d’ensemencer le monde d’azur et d’émeraude pour un finale éclatant d’améthyste reparaît, vague urgente et délicieuse. La danse macabre est oubliée : c’est le sacre de la chair que l’amour magnifie. Les oies chantent et le cœur qui bat est un chœur qui va : nul ne tient plus en place ! Mais l’éternel retour lui-même se lasse et l’on soupire au souvenir des crépuscules, ces âtres qui flamboient à l’horizon du monde : c’est qu’il va falloir – ô agonie – se préparer encore une fois à mourir, traversé l’automne, dans le prochain linceul de l’hiver.
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