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                « Vite, vite, vite ! songea Popouette, ou je serai en retard ! » Il enjamba la haie d’aubépines de son jardin en frôlant de sauvages roses, qui, surprises, rougirent d’un coup. Il courait à perdre haleine vers sa maison de grès bleu, couverte de neige, mais s’arrêta net devant ses pensées qui hochaient -las !- tristement, l’encolure de leurs pétales. Etonné de les voir si pitoyables, il mit cela sur le compte de leur couleur sinistre, un mauve proche du noir au grand soir, quand il les avait vues, la veille, tout juste dorées. « Je ne m’apprête pas pour un enterrement ! » fit-il en se penchant vers elles. C’est à peine si elles se redressèrent et il n’insista pas. Le temps lui manquait : on le lui avait pris pour la journée. Du reste, il s’y était attendu, attendu que cela arrivait tous les ans. La seule façon de le récupérer consistait à se rendre à l’église où, par une subtile transmutation organique extatique, il se dépasserait. Mais il fallait faire vite, sans quoi, il n’aurait plus jamais le temps. A supposer qu’on l’eût jamais. Il sauta par-dessus la balustrade du perron qui menait à l’escalier par où on accédait au palier de sa maison, à l’orée de la forêt, sise elle-même au bord du monde. Un écureuil, autrefois occupé à cerner le monde dans une noix, l’avait initié à la technique de ce mouvement. Popouette s’était exercé en sa compagnie, jusqu’à s’en briser les noisettes, mais il avait gagné grâce à lui une vivacité que lui enviaient les étoiles. Entré chez lui, il fit son introspection. Le chat, lové sur la table de la cheminée, trônait en roi débonnaire. Le nez en l’air, il suivait de ses yeux d’or la danse gracieuse d’un paon du jour. Puis il consentit à regarder Popouette. C’était le signal : celui-ci étendit la main et un ronronnement vibratile se transmit à son corps, qui lui rendit tout à fait sa sérénité. Popouette plissa les yeux en guise de gratification, ce que le félin, sans feuler nullement, agréa par le même clignement d’yeux. « Ah ! quand même, te voilà mieux ! » minauda-t-il. Popouette lui donna un baiser et, sortant de sa chaumière dont la cheminée chômait, car nous étions tout d’un coup en été, il se dirigea vers le haut sapin au pied duquel un renard l’attendait. « Tu es venu, chouette ! » s’apprêtait-il à claironner, lorsqu’un hibou, perché sur le faîte de l’arbre, poussa un glapissement sec. « Voilà que tu ruses, toi... » commença-t-il, la tête levée. Mais une pie s’envolant l’interrompit d’un interminable rire. Popouette resta un moment ballant, les bras confus, puis tourna la tête. Quelque chose l’attirait, magnétique. C’était à l’ouest, au couchant. On oxydait là-bas, à la flamme, une raison de vivre. « Normal, songea-t-il, elle ne tenait à rien. » Car tout dépendait du sens par lequel on la tenait, le but ultime étant d’en forger l’horizon en attente. Et, ma foi, ça travaillait dur, dans la fonderie !

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