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comment_180453

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Conquérants de l’inutile*

 

À l’heure où les complies

Enjoignent le glacier

De calmer ses ardeurs

De revêtir sa coule

Et que le vent du soir

L’assigne à résidence,

Dans l’espace refuge*

Tout au bord de l’abîme

Fatigués des combats

Soutenus tout le jour

Dorment les conquérants

Des sommets inutiles.

 

*

 

Le combat des séracs

Entre le frêle esquif

Et l’océan de glaces

Assoupi par le gel

Sur la grève endormie

Dévoile le silence,

Moment où les étoiles

Par la terre oubliées

Se disent leurs voyages

À la queue des comètes

Accrochent les volants

Des rêves inutiles.

 

*

 

L’Étoile du berger

Scintille à la lucarne

Réveille les dormeurs

Les cordes, les piolets

S’agitent en cadence

Devancent les grimpeurs,

Les pas s’en sont allés

Sur le glacier blessé

La trace s’est effacée

Là-haut les conquérants

Sans regarder derrière

Conquièrent l’inutile.

 

(Tarentaise, le 3 octobre 2024)

 

  • En lointains souvenirs du livre de l’alpiniste Lionel Terray, vainqueur de l’Annapurna « Les conquérants de l’inutile »
  • Le refuge évoqué ici est l’ancien refuge de l’aiguille du Goûter (sur la voie de Mont-blanc). Refuge posé au bord de l’abîme et assailli par le glacier. Plusieurs fois pendant la saison, on devait scier les séracs pour préserver le refuge.

 

- Illustration : Ancien refuge du Goûter (crédit photo https://kairn.com/montagne-alpinisme-lancien-refuge-du-gouter-ne-sera-pas-detruit/)

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  • Administrateur
comment_180466

Poème qui pourrait illustrer la vanité des ambitions humaines à travers un jeu de contrastes entre une nature, sublime mais indifférente, et l'obstination de l'homme. Ironie de nos quêtes éphémères face à un univers qui ne cessera de nous échapper.

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comment_180476

« Non ! Non! C’est bien plus beau lorsque c’est inutile. »

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comment_180479

Un superbe hommage à tous ces héros des sommets qui se lancent des défis et les relèvent avec panache !

Posté(e)
comment_180484
Il y a 8 heures, Tarentaise a écrit :

Moment où les étoiles

Par la terre oubliées

Se disent leurs voyages

À la queue des comètes

Accrochent les volants

Des rêves inutiles.

 

Quel beau passage ! 

et Je suis d'accord avec @Jeep  ; non ce ne sont pas des rêves inutiles  !

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comment_180494

Une belle évocation sous le signe de l'inutile... comme la poésie. vers courts, sans rime, l'idée n'en est pas moins mise en valeur (et peut-être mieux). La dernière syllabe de chaque vers rythme le poème car elle doit être (en subvocalisation) appuyée.

Modifié par Ferrandeix

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comment_180502
Il y a 1 heure, Diane a écrit :

Je suis d'accord avec @Jeep

et avec Edmond Rostand.

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comment_180504

J'ai beaucoup aimé cette forme inhabituelle, cher @Tarentaise💫

Des vers de toute beauté. Le titre interpelle... 

 

 

Posté(e)
comment_180528
Le 03/10/2024 à 08:10, Tarentaise a écrit :

Tout au bord de l’abîme

Fatigués des combats

Soutenus tout le jour

Dorment les conquérants

Des sommets inutiles.

 

Superbe ! J'ai beaucoup aimé ce poème en héxasyllabes. libres de rimes. 3 strophes de 12 syllabes, comme 3 traits verticaux vers le haut, vers l'inutile, et pourtant aussi l'essentiel,  qui ponctue chaque fin de strophe.

 

Une forme inattendue chez vous, cher @Tarentaise,  orfèvre es sonnets, mais subtile et trés aboutie, qui sert magnifiquement le sujet. 

Posté(e)
comment_180548

L'utopie est à l'horizon. Je fais deux pas en avant, elle s'éloigne de deux pas. Je fais dix pas de plus, l'horizon s'éloigne de dix pas. J'aurai beau marcher, je ne l'atteindrai jamais. A quoi sert l'utopie ? Elle sert à cela, elle sert à avancer." -Eduardo Galeano

 

... alors ce serait la même chose avec ces grimpeurs et leurs rêves ?...

Posté(e)
comment_180563

De scintillants hexamètres qui évoquent avec panache le goût propre à l'homme de se rendre maître des éléments qui le fascinent. Quel beau contraste avec l'indifférence de ces éléments. Et comme votre plume sait, Alain, nous plonger en quelques mots dans l'atmosphère fébrile des ces passionnés de la grimpe!

Le 03/10/2024 à 08:10, Tarentaise a écrit :

 

Le combat des séracs

Entre le frêle esquif

Et l’océan de glaces

Assoupi par le gel

Sur la grève endormie

Dévoile le silence,

Moment où les étoiles

Par la terre oubliées

Se disent leurs voyages

À la queue des comètes

Accrochent les volants

Des rêves inutiles.

 Superbe! 💫

Vous nous gâtez avec les vers blancs autant qu'avec la forme sonnet.

Posté(e)
comment_180577

Peut-être est-ce inutile mais je vous le dis tout de même Tarentaise, j'aime votre écriture, elle traverse les espaces, aujourd'hui les sommets enneigés. L'inutile est affaire de regard.

Posté(e)
comment_180922

Pour gravir ce poème avec mes yeux, il m'a fallu m'arrêter plusieurs fois, émerveillée ... J'aime beaucoup la forme que vous avez employée qui sied parfaitement au sujet. 

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  • Auteur
comment_181108

Un jour viendra peut-être où nous saurons distinguer entre le faux utile et le vrai inutile !

Merci de vous être laissés attirer par les pentes @Joailes @Eobb @Thy Jeanin @Racine Montignac @Danivan @Sophie @Jeep @Ferrandeix @Illiz @Diane @Alba @Eathanor