Posté(e) 4 août 20244 août comment_175755 Le navire Night Il s'appelait "Night", oui, comme la nuit. C'était un beau navire, ancien, mais rapide et bien tenu. Il allait joyeux sur toutes les mers du monde. Ses passagers, nombreux, profitaient de la fête permanente qui régnait à bord. Le personnel assurait avec dévouement et discipline tout le confort de ses croisières de luxe. Un triste jour, hélas ! son capitaine quitta ce monde. Curieusement, rien ne se passa. L'équipage fut seul au courant de ce drame. La croisière en cours se poursuivit comme si de rien n'était. Toutefois, les escales prévues ne furent pas respectées et le navire n'atteignit jamais sa destination finale. La fête continuait à bord, nul ne posait de question sur cet interminable voyage qui ne finissait jamais. Le personnel ne broncha pas. Les tours du monde s'enchaînèrent sans heurt. Aucun ravitaillement ne parut nécessaire, nulle halte ne survint dans des ports hospitaliers. Disque étrangement rayé, le même film passait en boucle sur le cinéma du bord. Personne ne s'en émut. Étrange ambiance, en vérité : bizarres passagers, estivants comblés jouissant d'un bonheur éternel mais ô combien suspect. Quant à l'équipage, il restait aussi placide et dévoué qu'auparavant. Bateau fantôme, microphone enroué, la mécanique se dévidait sans heurt, la vie à bord se déroulait sans murmure. On s'amusa beaucoup, on vieillit, on mourut, la fête se prolongeait toujours, sans la moindre protestation. Avait-on acheté intelligence et lucidité avec quelques menus plaisirs et des jours garantis sans souci ? Qui le sait ? La navire tournait toujours en rond autour de la Terre. Il doit encore naviguer en boucle à l'heure actuelle, c'est très possible. Tout le monde est mort, peut-être... Je n'en sais rien. Il faudrait poser la question au perroquet du bord. FIN (Alba) Modifié 4 août 20244 août par Alba
Posté(e) 4 août 20244 août comment_175762 Il y a du diable là-dessous, mille sabords! Cela ressemble à une malédiction de nos modernes mœurs, ripailles insatiables, itérations de nos vies de jouisseurs.
Posté(e) 4 août 20244 août Auteur comment_175768 Tu as raison, @Thy Jeanin, c'est bien une allégorie. Mais de qui ou de quoi ? Il faut poser la question au perroquet du bord... 😉
Posté(e) 6 août 20246 août comment_175890 Une sorte de voyage sans fin dans une quête stérile. Et ce perroquet en est resté muet, il n'a rien voulu me dire ! 😉
Posté(e) 6 août 20246 août Auteur comment_175923 Il fallait lui lire Baudelaire... 😉 "Pendant que des mortels la multitude vile, Sous le fouet du Plaisir, ce bourreau sans merci, Va cueillir des remords dans la fête servile..." Ch. Baudelaire
Posté(e) 6 août 20246 août comment_175931 Oups pardon ! J'aurais dû y penser ... 😉 je retourne sur le navire ! Il en est un plus laid, plus méchant, plus immonde ! Quoiqu'il ne pousse ni grands gestes ni grands cris, Il ferait volontiers de la terre un débris Et dans un bâillement avalerait le monde ; C'est l'Ennui ! - l'oeil chargé d'un pleur involontaire, Il rêve d'échafauds en fumant son houka. Tu le connais, lecteur, ce monstre délicat, - Hypocrite lecteur, - mon semblable, - mon frère !
Posté(e) 17 août 202417 août comment_176904 Une croisière sans fin où l’on continue de danser sur le pont du Titanic, n’est-ce pas l’image de notre société ?