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Conversations avec le capitaine (8)


Thy Jeanin

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LETTRE DU CAPITAINE A MOI-MÊME

 

 

Moussaille

 

 

J’ai appris ce qui vous est arrivé.

Il semble que votre ami, cet être étrange que vous prétendez héberger dans votre cave, un certain « Xtra », vous ait, par vengeance, fait subir un drôle de sort. Vous seriez devenu un félin domestique de l’espèce – du reste fort sympathique – appelée chat.

Et, ma foi, vous voici en très mauvaise posture, n’ayant pas de ce qu’on appelle « maître ».

C’est pourquoi j’ai décidé, n’écoutant que mon bon cœur et eu égard à ma responsabilité de chef de bord, de me porter à votre secours.

Voici de quoi vous ramener à la surface en attendant que ce charme se dissipe: je viens vous voir chez vous, vous prends aussitôt sur mon épaule et, à l’instar du Crabe-Tambour, je vous emmène naviguer en des eaux plus sûres.

Nous irons visiter ensemble les souris, cela nous fera le plus grand bien. Les sirènes souffrent d’une épidémie de syphilis en ces temps bien tristes.

Ne bougez donc d’où vous êtes : j’arrive.

 

 

Votre capitaine

 

 

 

 

LETTRE DE MOI-MÊME A MON CAPITAINE

 

 

Capitaine

 

 

Vous êtes bien bon de vous préoccuper de mon sort, certes peu enviable. Si j’aime l’espèce féline, avec laquelle j’ai certes quelques accointances, il m’est malaisé, dépourvu d’expérience que je suis, de demeurer en cet état.

J’accepterais bien volontiers vos bons soins si mon sort ne s’était aggravé : las ! me voici réduit à n’être rien. Je ne vous mens pas : je n’existe tout bonnement pas !

Il ne servirait à rien que vous déplaciez. Croyez bien que je préfèrerais vous répondre oui.

 

 

PS. Pardonnez la hideur de mon écriture : il est très difficile de tenir une plume entre ses griffes (j'ai commencé la présente quand j'étais encore chat), davantage encore quand il n’y a plus rien du tout pour la tenir. Et cependant, j’y parviens encore, ce qui me laisse quelque espoir. Continuez donc, je vous prie, à m’écrire, car, contre attente, je puis toujours vous lire.

Xtra a sans doute la clef de ce mystère...

 

 

Révérencieusement vôtre

 

 

 

 

LETTRE DU CAPITAINE A MOI-MÊME

 

 

Moussaille

 

 

Nom d’un maelström ! J’en dors tout debout! Ou vous êtes de plus en plus fou, mon garçon, ou alors… Il faut que j’y voie plus clair. Expliquez-moi cela. J’ai le temps de vous lire. Faites-moi le récit de cette étrangeté : un être en jetée qui débouche sur du rien... Construisez-moi l’incipit de votre récit. Je reste en contact avec vous. Nous finirons bien par trouver une solution.

 

 

A vous lire

 

 

 

 

LETTRE DE MOI-MÊME A MON CAPITAINE


Non, je n'existe pas.


Bien sûr, vous allez protester: ce n'est pas possible! Ce n'est pas drôle! Etc.
Je sais que c'est difficile à admettre. Mais que voulez-vous! Il faut s'y faire -et n'y surtout pas chercher une raison.
Ai-je jamais existé, d'ailleurs? J'en doute. Il est certes convenu que j'ai un état-civil. Soit. Pourtant, je ne rencontre jamais les yeux des autres.
Une naissance, une mort à venir. Voilà au moins deux événements qui balisent ce trajet tranquille, trop tranquille. Je veux bien m'y prêter sans mauvaise grâce, bon garçon.
Mais l'étrange est là: autour de moi. Ils passent sans me voir. Je suis une sorte de trou noir ambulant. Ils le sentent, qui m'évitent quasi instinctivement. Ce qui tend à prouver que mon inexistence est en quelque sorte signalée - en tout cas perçue.
Au reste, je n'y prête plus guère attention. Aussi toutes ces braves gens finissent-ils par me sembler eux-mêmes singulièrement fantomatiques. Drôle de confrérie où je devrais avoir ma place et dont je demeure exclu!
En pleurer? Plus maintenant. A dix-sept ans, j'ai tout pleuré. Il ne me reste plus de larme. J'observe. Je jouis d'une curieuse liberté. Je me marre, même. Jaune. Ce que je vois est bien souvent laid, décevant, pitoyable.
Et je perds mon temps. Comme tout le monde, d'ailleurs: exister, n'est-ce pas proprement perdre son temps? Certes, moi, je le perds dans tous les sens du terme. En particulier, toute idée de bonheur -si tant est que ce mot ait encore un sens- m'est bien évidemment interdite. J'en ris - noir.
Mais désormais, qu'importe!

Vous allez peut-être m'en vouloir -mais il faut s'attendre à ce que, en tant que fantôme, je divague un peu. En effet, c'est un état qui ne vous assure guère le pas. Devant les autres, devant vous, on se sent piteux d'avoir à être et de n'exister pas. Ah ça! se dit-on, le monde ne tient-il pas au creux de la patte du diable? Mais ce ne sont que là que délires passagers, et l'on passe malgré tout.


Pour aller où?

Voici des traces qui pourraient bien ne mener nulle part.

 

 

 

Modifié par Thy Jeanin
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