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Deux petits biscuits, une infusion


Joailes

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« Ne pas déranger » disait la petite pancarte accrochée à la porte de mon bureau où je travaillais depuis plusieurs heures. Bien que parfois distraite par quelque chant d'oiseau, roucoulades de tourterelles, claquements de pies, j'étais assez concentrée sur mon travail : une sorte de thèse sur les écrivains, scribouilleurs et autres gratte-papier dont j'étudiais depuis quelques mois le comportement.
J'avais multiplié les entretiens avec des écrivains en herbe et je me disais que beaucoup parmi eux allaient rester dans l'herbe, au ras des pâquerettes.
J'en avais quelque peine pour eux, mais parfois la plume n'ébranle aucune âme et l'on n'y peut rien. 
 
Je tenais bien mon sujet, j'avais déjà écrit un bon pavé et je songeais, en massant mes tempes endolories, qu'il serait peut-être temps de faire une pause.
Le singe posé sur ma bibliothèque profita de ce moment pour descendre de son étagère et après s'être étiré, il se mit à jongler avec mes feuillets épars en poussant de petits cris, avec des grimaces à faire rire un croque-mort. 
Curieusement, je le laissai faire sans pouvoir bouger d'un poil.
Il déchira le papier, en découpant les mots minutieusement, un par un, qu'il lança par la fenêtre ; les oiseaux les prirent dans leur bec et formèrent un cercle étrange au-dessus des arbres.
Au bout d'un moment, on aurait pu croire qu'il avait neigé, tous ces flocons de papier c'était joli, comme un champ de pâquerettes au printemps.
Le singe riait et je riais aussi, il me prit la main et nous sautâmes par la fenêtre ; c'est alors que je vis le papier se transformer en copeaux, qui formèrent des troncs, puis des arbres.
Les mots s'accrochèrent un instant encore, et se muèrent en feuilles d'un beau vert menthe, peut-être vert verveine, ça m'a donné envie de boire quelque chose de chaud, alors qu'un parfum de gâteau arrivait à mes narines, peut-être de madeleines qui me rappelait les goûters d'autrefois, après l'effort, le réconfort, disait grand-mère lorsque j'avais terminé mes devoirs.
 
J'entendis de petits coups discrets frappés à la porte et m'éveillai brusquement.
Le singe était toujours sur l'étagère.
- Chérie, tu veux ton petit goûter ?
- Oui, volontiers, répondis-je. Deux petits biscuits et une infusion …
Le temps que je réalise que je venais de rêver, en deux coups de cuillère à peau, j'avais devant moi un plateau avec un bol fumant et parfumé et quelques gâteaux secs…
Je rangeai mon travail et, consciente de ma lassitude, encore sous l'emprise de mon songe, je pris mon quatre heures, sous les yeux immobiles du singe, bien calé entre deux livres de méditations poétiques.
(J.E. Avril 2020)
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