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Somnium


Epsiløn

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Ou le sommeil immuable d’un futur inimaginable...

 

 

 

Je n’ai rien vu des villes qui s’ébrouent dès l’aurore

Les rubans taciturnes qui s’étendent fébriles

Par ces rues dévastées qui s’envolent et retombent

Dans le souffle des pas où tout semble perdu

Et les gorges avides des égouts s’extasient

Charriant des rivières diurnes la fange luxuriante

Sur les ponts et les cimes tout fuit l’orage gras

Les quais sevrés d’écume s’épanchent dans le vide

Exhalant le substrat en une œuvre spectrale

Libres d’empuantir les falaises élimées

 

Je n’ai rien vu des villes parsemées de basalte

Mâchoires souterraines imposantes aux abois

Se liant au flamboyant étendard de la foule

Tourbillon désoeuvré dans le coeur du beffroi

Où s’échoue la sanie jusqu’au fond des usines

Et les cernes de pluie filtrant l’immense plaie

Saigneront de leurs larmes le plâtras de nos ruines

Sur la scène branlante de cités avilies

Cheminées ionisantes sur un lit de pistils

Qui ne s’éveilleront plus aux abords du levant

 

Il n’est point de lumières ni de nuits plus paisibles

Que la mort en ces plaines laconiques et fumeuses

Inoculant la fièvre sur la scène défunte

Au firmament des voies parcourues de béances

Les corps entiers pulsant au milieu des ravines

D’une ogresse machine broyant  les vies de nues

Et les plaintes ignobles des squelettes de brume

Aspergeant de leur bile des matins pernicieux

Aux moignons rouges et mornes de moellons et de naphte

Emprisonnent les chairs dans le froid des ténèbres

 

Qu’ai-je donc vu au fond si ce n’est la laideur

Les tombeaux d’absolu sur les monts recouverts

Les bataillons maudits de hérauts éphémères

Happés par le déclin de voilures insondables

Mêlant l’effondrement aux cithares des aèdes

Les briques enchevêtrées martelées jusqu’au ciel

Dans le trop plein d’asphalte sur les franges de l’aube

Les focales surannées en divisions de blocs

Lanternes opacifiantes parcourues d’immondices

Sur des chemins de plomb englués de sommeil

 

Je n’ai rien vu des villes et pourtant je suis las

Des ombres continuelles qui s’échinent haletantes

Dans les rêves sanglants des entrailles au lithium

Et le cœur des machines qui pourrissent les veines

Tressent des échancrures parées de silicium

Sous la voûte étoilée d’une lune sans trêve

Qui s’étale à l’envie et d’ennui se morfond

Au rythme d’un pendule échoué sur la grève

 

Somnium qu’as-tu fait 

Tu as vaincu les peurs

Et les cris des enfants qui mordaient la poussière

Banni l’adversité, aboli les douleurs

Façonné les esprits d’une glue nourricière

 

Demain ne sera plus qu’une vague silhouette

Un murmure dans la nuit insondable et puissante

Une brève spectrale aux abords de l’abîme

S’éteignant dans le songe immuable des jours

Le vide enseveli sous des monts de silence

  • Merci 9
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