La pluie s’est tue sans prévenir,

et dans le creux de ma paume

reste une trace d’eau,

minuscule et fidèle.

 

Je regarde autour ;

les pierres ont séché leurs visages,

le vent reprend son travail de bête,

et la lumière s’effiloche entre deux champs.

 

Je ne sais plus ce que je cherche,

sinon la preuve que j’existe encore,

dans cette herbe couchée par le vent,

dans ce bruit qui n’a pas de nom.

 

Tout est là pourtant :

le fer des outils,

la craie sur les ongles,

le goût du pain dans l’air du soir.

 

Alors je tends la main,

pas vers le ciel,

mais vers le sol.

 

Lui seul me répond.

Dans cette approche purement sensorielle du monde, une certaine vacuité de l'être se trouve en quelque sorte apaisée par la présence sans faille de la matière, - ou du poids du monde.

Alors je tends la main,

pas vers le ciel,

mais vers le sol.

 

Lui seul me répond.

Tendre la main vers le sol, et non vers le ciel, c'est choisir, à mon sens, l'immanence, le tangible, comme seule réponse possible. Votre poème, Eathanor , est d'une force rare et bouleversante : vous donnez vie au paysage et celui-ci devient le miroir de l'âme qui s'interroge. Beaucoup d'émotion!!

Que ce soit le sol qui réponde et non le ciel signifie beaucoup ; un beau poème, presque charnel si je puis dire dans son approche, son toucher même, de l'environnement (la pluie, les pierres, la craie...).

J'aime cette approche sensorielle du monde et cette profondeur des mots, @Eathanor

Plus que jamais, dans tes derniers poèmes, l'écriture creuse.... ( en référence à la citation)

La terre comme ancrage, le réel, la solidité, la stabilité...

L'émotion est présente au fil des vers.

Le poème est dépouillé jusqu’à l’os, pour revenir à l’essentiel, l’ancrage dans le sol qui permet de se relier à soi. Un bel écrit.

Le montagnard que je suis sait bien que si le sol se dérobe, les abîmes sont proches… Votre poésie dépouillée porte vers l’essentiel. Une très belle lecture @Eathanor .

Une belle tranche de vie.

J'ai cette impression que beaucoup de vos textes peuvent ce rapporter à un certain ouest américain. J'entends ici le grincement régulier d'une éolienne, le vent qui balaie la grande plaine où survivent deux ou trois arbres autour d'une ferme auparavant animée de vies.

Ne reste que le laborieux qui se questionne sur son sort.

La réponse n'est pas dans l'au-delà, mais dans le pain, les outils et le sol : une forme de sagesse qui retrouve la preuve d'exister dans l'humble fidélité du réel.

Je suis surprise, et j'aime ça.

Un poème qui m'a ému profondément .

La forme, moins stéréotypée, participe d'un apaisement savoureux : la pluie en paume, le goût du pain, l'air du soir, la lumière qui s'effiloche... La vie s'est réduite, mais elle reste fidèle. Et la vie vient du sol. Il n'y a rien dans les nuages. La mention des outils me rappelle un adage qui m'est cher : in labore quies. Pardon de paraphraser ce beau poème, Guillaume, mais l'état d'esprit qu'il traduit plaît beaucoup à l'épicurien que j'essaie d'être.

Le 02/11/2025 à 19:52, Eathanor a écrit :

Je ne sais plus ce que je cherche,

sinon la preuve que j’existe encore,

dans cette herbe couchée par le vent,

dans ce bruit qui n’a pas de nom.

J'adore aussi le premier quatrain.

Beaucoup de mélancolie dans ce beau texte.