Posté(e) 9 avril9 avril comment_193733 Le Violon d’Émeline Deuxième Partie Que faire à présent ? Elle était partagée, à la fois effrayée mais aussi fascinée par cette expérience hors du commun. Devenait-elle démente, en proie à de subites hallucinations ? Il fallait en avoir le cœur net. Elle prit son courage à deux mains (et son violon dans l’autre, sans doute), puis quitta le salon. Elle gagna l’office, qui semblait bien paisible. Les longues rangées de casseroles en cuivre (sa passion depuis toujours) brillaient comme un sou neuf. Là, près du réfrigérateur, elle reprit son archet et poursuivit la mélodie polonaise. Elle trouvait un peu étrange d’être obligée de se réfugier dans une cuisine pour tester son instrument mais que pouvait-elle faire d’autre, à part appeler une ambulance ? Elle ne pouvait compter que sur elle-même. La mazurka joyeuse se fit entendre sans tarder en ces lieux ancillaires, peu habitués à pareille animation. Aussitôt, les casseroles quittèrent les murs bien lessivés pour aller se trémousser aux côtés d’Émeline, semblant l’inviter à entrer dans la danse. Entrer dans la danse ? Quelle horreur ! De même, fourchettes et couteaux surgirent des tiroirs et se hâtèrent de rejoindre les casseroles. C’était la fête ! Quelle ambiance de folie ! Ces dames et ces messieurs de métal s’éclataient tous ensemble ! Les cheveux de la jeune femme se dressèrent quant à eux sur sa tête. Dans ce piteux équipage, Émeline sortit au galop de la cuisine et regagna le salon, terrifiée, suivie par la horde bondissante des casseroles et des couverts déchaînés. Elle avait évidemment lâché l’archet aussitôt mais cette fois-ci, le violon poursuivait sa besogne tout seul, trottinant avec vélocité derrière elle et jouant toujours avec ardeur sa musique légère. La mélodie flottait dans l’air. Le plafond de la grande pièce sembla sourire, les voilages accrochés aux fenêtres commencèrent à se dandiner… Les choses viraient vinaigre. Et sérieusement. Épouvantée, la jeune femme traversa en hâte toutes les pièces et sortit précipitamment de son logis. Elle eut le temps avant de rejoindre le jardin de voir meubles et rideaux battre la mesure avec ardeur dans le hall d’entrée du manoir aux sons du violon endiablé. Une vraie sarabande ! Émeline atteignit ses arbres favoris et se blottit contre leur écorce chaude encore. La journée d’été avait été torride. Peu à peu, elle se calma. Fallait-il appeler les pompiers, la gendarmerie ? De toutes façons, elle n’avait pas son portable sur elle et les militaires la prendraient pour une folle. Ce qu’elle était peut-être, d’ailleurs… Elle ne savait plus que penser. Restait sa peur immense. Elle tenta de réfléchir. Elle allait attendre le jour, pelotonnée contre ses amis les arbres. Elle ne risquait rien avec eux. Dans la clarté de l’aube, elle trouverait peut-être le courage de regagner sa demeure et puis, les événements auraient sans doute évolué. Rien de mieux que la lumière du jour pour chasser les fantômes ! Elle ferma les paupières, essayant de se concentrer sur ses sensations pour fuir sa peur. Un oiseau de nuit s’entendait dans le lointain, une plainte fine et douce, sans doute un engoulevent. Le feuillage, attendri sans doute par la brise nocturne, murmura pour elle une douce berceuse. À suivre…
Posté(e) 9 avril9 avril comment_193770 L'âme du violon et les casseroles en cuivre ne devraient pas faire peur. Emeline a dû faire un repas trop copieux.
Posté(e) 10 avril10 avril Auteur comment_193776 Il faudra lui envoyer de l'Alka-Seltzer, Joailes ! 😉 Merci pour ta lecture !
Posté(e) 14 avril14 avril comment_194130 Un violon au milieu de casseroles? Horror! Horror! Horror! C'est le diable à Vauvert! La nature consolante aura-t-elle raison du déferlement des esprits malintentionnés?
Posté(e) 14 avril14 avril Auteur comment_194144 Merci, @Thy Jeanin, pour cette indignation ! Mais après tout, une casserole peut produire un son mélodieux quand on la frappe avec doigté et se révéler instrument de musique comme un autre... Demande donc son avis au violon de Paganini que @Joailes a ressuscité ! 😉
