Et puis je m'éloigne en jetant un coup d'oeil sur mon village aux façades sans couleurs, et sur ces rues qui se souviennent trop de moi. Sempiternelle ritournelle jouée et rejouée, celle d'un mortel ennui. D'abord des fourmis brillant au soleil comme des larmes dans l'ombre d'un vieux mur pas beau. Mais soudain, ô bonheur ! un crucifix à plumes se perche en haut du toit d'une ferme et me convertit à sa religion céleste, celle d'Apollo-Soleil qu'on ne peut regarder en face. Et un rayon me lance une opale de feu, d'air, d'eau et de terre. Dieu, on le délaisse, et puis un jour on revient vers lui lamentablement.

J'admire un caillou peint par l'enfant oisif.

Et je kiffe la sève vivifiante qui ouvre à la vie ses bras liquides.

Je découvre la mouche noire vrombissant au pied d'une bruyère « zen » épanouie et imperturbable.

Je goutte l'eau toujours libre qu'aucune cage ne peut retenir même pas la fontaine.

Mais ici vous bâtissez ?! Et avec vos travaux où sont passés les coquelicots du talus ? Je les voyais depuis longtemps au bord de cette route. Je ne faisais même plus attention à eux, habitué que j'étais à les savoir là où ils fleurissaient chaque année. Mais avec le temps qui efface nos souvenirs qui se souviendra d'eux lorsque le béton les aura supplantés ? Et ces imposantes touffes d'herbe profon-dément enracinées, je n'imaginais même pas qu'un jour on les arracherait, eh bien, les voilà bulldozées, frères écolos ! Ce vert paradis sera-t-il un jour aussi lointain que le sont l'Inde et la Chine ? Le papillon qui survolait le pissenlit aux pétales jaunes, où est-il ? disparu à jamais ? Non ! car les mots du poète ne sont-ils pas des papillons qui butinent la poésie en fleur ?

Soudain la nuit tombe sur moi, le soleil ne la salue même pas. Parfois, savez-vous, la mélancolie coupe en deux mon cœur le soir et recueille l'encre obscure des étoiles de l'infini pour le remplir d'idées noires, mais heureusement passagères, car cette poésie-fleur que je chérie me guérit d'un subtil pollen spirituel, que je butine avec mes mots.

Ma divise, faire ce qu'on peut quand on ne peut pas faire plus.

Prescription perso, devenir « buveur d'encre » ! Que ma plume avale donc une goutte d'encre matin et soir, et il me faudra écrire et écrire jusqu'à blanchir mon esprit grâce à la pure noirceur de ce breuvage nourrit d'inconnu qui plus noir qu'eux absorbe mes pires tourments.

 

Modifié 13 octobre 20241 a par Jean Luc

Promenade en un lieu familier et méditation itinérante l'acompagnant.

 

Une jolie prose, d'une grande profondeur, assez mélancolique et nostalgique. Parfois, un bel envol poétique, une jolie métaphore au fil de la plume.

 

J'ai regretté les quelques familiarités qui me semblent détonner dans l'ensemble ("je kiffe", "prescription perso").

Le poète butineur certainement... Devient il pour autant écolo ? J'aimerais bien.

Joli texte. Mais je l'aurais plutôt vu dans plume errante 🐱

Le titre est superbe. Les métaphores ont un relief indéniable.

Et je kiffe la sève vivifiante qui ouvre à la vie ses bras liquides. 

Je découvre la mouche noire vrombissant au pied d'une bruyère « zen » épanouie et imperturbable.

J'ai aimé l'éruption de ces mots dans votre prose , @Jean Lucoù s'opposent modernité et bucolisme.

car les mots du poète ne sont-ils pas des papillons qui butinent la poésie en fleur ?

Assurément, ici.

Parfois, savez-vous, la mélancolie coupe en deux mon cœur le soir et recueille l'encre obscure des étoiles de l'infini pour le remplir d'idées noires, mais heureusement passagères, car cette poésie-fleur que je chérie me guérit d'un subtil pollen spirituel, que je butine avec mes mots.

Une émotion à fleur de mots pour une poésie-fleur.

Quelle belle prescription, @Jean Luc! 

Que ma plume avale donc une goutte d'encre matin et soir, et il me faudra écrire et écrire jusqu'à blanchir mon esprit grâce à la pure noirceur de ce breuvage nourrit d'inconnu qui plus noir qu'eux absorbe mes pires tourments.

 

 

Une petite fable libre pas si délirante qu'elle en a l'air dont je kiffe le message!

Le 13/10/2024 à 02:54, Jean Luc a écrit :

Que ma plume avale donc une goutte d'encre matin et soir,

une prescription pour guérir du mal qui nous enserre.