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  • Enjambement et rejet

     

    Soyons précis : 
     
    Ce qui est important, c'est que cet enjambement ne doit pas se faire d'une strophe à l'autre. L'effet est absolument désagréable, car l'impression de ne pas avoir exprimé une idée en un seul couplet laisse présager de l'amateurisme de l'écrivain.
    Alors, pour étayer ce propos, voilà en clair ce qu'il ne faut pas faire : 
     
           ... Ainsi, tout jeune encore et plus audacieux,
          Sur la gloire un instant j'osai fixer les yeux :
          Un point noir est resté dans mon regard avide 
     
          Depuis, mêlée à tout comme un signe de deuil,
          Partout, sur quelque endroit que s'arrête mon œil,
          Je la vois se poser aussi, la tache noire ! ...

     

    Gérard de Nerval, Le Point noir 
     
    A la fin du premier tercet, il n'y a aucune ponctuation, l'œil se dirige directement sur le couplet suivant, alors qu'un espace-temps est marqué à la séparation des deux strophes. C'est cet espace-temps qui coupe l'harmonie du poème. 
     
    De façon plus nette, je vous livre cet exemple, texte écrit par moi-même au tout début, alors que j'étais ignorant de ces règles de prosodie : 
     
          ... Les douces ondes des complaintes sont
          Le rythme régulier de la symphonie des saisons ;
          Le printemps accompagne les paroles de la beauté éternelle
          Qui est là, le rouge aux joues, contant d'une voix claire et belle 
     
          La magnificence d'un spectacle divin :
          Nature inviolée par les humains,
          Nature aux senteurs exceptionnelles,
          Nature à l'identité superficielle…

     

    Pierre BRANDAO, Beauté éternelle, extrait 
     
    Je sais, ce n'est pas un texte franchement terrible, mais je viens de le dire, à l'époque j'étais plus poète libre que classique ou encore libéré. Je ne maîtrisais pas l'enseignement que je tente aujourd'hui de vous livrer. Si j'ose montrer cet extrait, c'est uniquement pour que vous voyez ce qu'il ne faut pas faire !
    Regardons l'entre deux strophes : à la fin du dernier vers de la première strophe, aucune ponctuation, et le premier vers de la deuxième strophe reprend l'idée du précédent.


    Bon, je ne vais pas trop vous donner de mauvais exemples, car sinon je vais perdre ma crédibilité ! 
     
    En classique pur, l'importance du vers est marquée par la présence de la rime. Celle-ci, placée à la fin, donne au texte musicalité, sens et rythme. La présence de l'accent fixe à la fin du vers est primordial, un repos doit être observé, c'est ce qui donne tout le charme du vers conçu.
    L'enjambement, c'est lorsque cette possibilité de repos n'est pas observée, soit à l'hémistiche, soit à la fin du vers. C'est lorsque le créateur, embarqué par l'élan de son premier vers, ne sait plus comment le finir, s'oblige à trouver une suite, parce qu'il faut bien en trouver une ! 
     
    Cela arrive aussi quand le besoin d'une rime se fait sentir, le poème est écrit à cloche-pied, une impression de "raté " se présente à l'oreille, la rime se trouve "forcée". 
     
    Même en poésie libérée, il faut s'interdire l'enjambement...

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