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  • La louange des Saints Innocents


    « Que je porte d’envie à la troupe innocente

    De ceux qui, massacrés d’une main violente,

    Virent dès le matin leur beau jour accourci !

    Le fer qui les tua leur donna cette grâce

    Que, si de faire bien, ils n’eurent pas l’espace,

    Ils n’eurent pas le temps de faire mal aussi.

     

    « De ces jeunes guerriers la flotte vagabonde

    Allait courre fortune aux orages du monde,

    Et déjà pour voguer abandonnait le bord,

    Quand l’aguet d’un pirate arrêta leur voyage ;

    Mais leur sort fut si bon que d’un même naufrage

    Ils se virent sous l’onde et se virent au port.

     

    « Ce furent de beaux lis qui, mieux que la nature,

    Mêlant à leur blancheur l’incarnate peinture

    Que tira de leur sein le troupeau criminel,

    Devant que d’un hiver la tempête et l’orage

    À leur teint délicat pussent faire dommage,

    S’en allèrent fleurir au printemps éternel.

     

    « Ces enfants bienheureux, créatures parfaites,

    Sans l’imperfection de leurs bouches muettes,

    Ayant Dieu dans leur cœur ne le purent louer ;

    Mais leur sang leur en fut un témoin véritable :

    Et moi, pouvant parler, j’ai parlé, misérable,

    Pour lui faire vergogne et le désavouer !

     

    « Le peu qu’ils ont vécu leur fut grand avantage,

    Et le trop que je vis ne me fait que dommage,

    Cruelle occasion du souci qui me suit !

    Quand j’avais de ma foi l’innocence première,

    Si la nuit de ma mort m’eût privé de lumière,

    Je n’aurais pas la peur d’une éternelle nuit.

     

    « Ce fut en ce troupeau que, venant à la guerre

    Pour combattre l’enfer et défendre la terre,

    Le Sauveur inconnu sa grandeur abaissa ;

    Par eux il commença la première mêlée ;

    Et furent eux aussi que la rage aveuglée

    Du contraire parti les premiers offensa.

     

    « Qui voudra se vanter, avec eux se compare,

    D’avoir reçu la mort par un glaive barbare,

    Et d’être allé soi-même au martyre s’offrir ;

    L’honneur leur appartient d’avoir ouvert la porte

    À quiconque osera d’une âme belle et forte

    Pour vivre dans le ciel en la terre mourir.

     

    « Ô désirable fin de leurs peines passées !

    Leurs pieds, qui n’ont jamais les ordures pressées,

    Un superbe plancher des étoiles se font ;

    Leur salaire payé les services précède ;

    Premier que d’avoir mal ils trouvent le remède

    Et devant le combat ont les palmes au front.

     

    « Que d’applaudissements, de rumeur et de presse,

    Que de feux, que de jeux, que de traits de caresse

    Quand là-haut en ce point on les vit arriver !

    Et quel plaisir encore à leur courage tendre,

    Voyant Dieu devant eux en ses bras les attendre,

    Et pour leur faire honneur les anges se lever ! »


    Illustration: Saint Pierre - Gravure anonyme



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