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Sale eau dans la douve


Marc Hiver

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Par la fenêtre ouverte absorbant mes pensées,

Dans ce château désert en proie à mes fantômes,

Envers et contre tous, du temps que j'étais môme,

Je contemplais la douve aspirant le noyé.

 

La lune en son trois quarts éclairait une friche,

Un amas de ronciers où je m'écorcherais

Avant que de mourir en retrouvant la paix

Qui me faisait défaut d'une vie à la triche.

 

À force de pleurer sans espoir de retour,

De paniquer en selle au galop des licornes,

Le cœur tant asséché par une âme sans borne,

Il ne me restait plus qu'à abdiquer l'amour.

 

Mais tout d'un coup, d'un seul, au détour de mes vers,

Un chant de soprano occupa tout l'espace

Et le temps derechef m'extirpa de la nasse

Tant et si bien d'ailleurs qu'une brise de mer

 

Rafraîchit mes vieux os de la côte si proche

Au son de la marée et rythmée par les vagues

D'une eau effervescente, écume de ces tags,

Quand l'ancre des bateaux s'encastre dans la roche.

 

Elle arpentait la grève au risque de trouver

Cet homme sans attente au plus haut de sa tour

La regardant sourire apportant sans détour

De la légèreté aux confins situés

 

Bien loin de ce pays d'où l'on ne revient pas.

Mais sa si pure voix à tort ou à raison

Dissonait à l'envi sur la gamme de plomb

Foulant l'arpège ailé  entre le fa pas là.

 

Devant elle la ronce écaillait ses piquants,

Son pas devint farouche en s'approchant de moi,

Franchissant les fossés et je fus pris d'effroi

Avant l'aube nouvelle impossible au néant. 

 

Je l'avais appelée et, armée de sa faux,

Elle avait entendu mon appel au secours

En accourant d'enfer pour qu'au pied de la tour

Je mourusse en ses bras, et pas comme un salaud.

 

Toi qui vas me rejoindre, pourvu que le jour dit

Quand la bête immonde prendra l'air d'une fée,

Confirme bien ton choix avant que de sonner

Pour l'aller sans retour d'où la vie te maudit !

 

Modifié par Marc Hiver
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