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Expérience 82 – Sujet 03


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EXPERIENCE 82 – SUJET 03

 

J’ai quelques douleurs,

Si cela intéresse ces messieurs.

Que voulez-vous savoir ?

Vous épiez ma cage nuit et jour,
N’est-ce pas ?

Vous savez déjà tout.

Pourquoi cet exercice ?

Voulez-vous au moins,

Savoir où j’ai mal ?

Le savez-vous déjà ?

Mes maux m’inquiètent.

Non attendez,

Laissez-les-moi.

Cette inquiétude,

C’est tout ce que j’ai,

Tout ce que vous m’avez laissé,

Pour converser avec le réel.

Que le temps file quand on s’inquiète,

Je le sens fuir entre mes sens,

Et il peut bien filer.

Qu’il aille,

Et plus vite encore.

Qu’il se décide même,

Ce sera lui ou moi.

Je lui trancherais bien la gorge,

Le brûlerais bien vif,

Qu’il me supplie,

Traînant péniblement ses dernières heures.

Dans un dernier élan sauvage,

Je saisirais ma chance,

Rejoindrais les flammes,

Dans ce somptueux sacrifice,

J’aurai tué le temps.

Qu’il est bon ce sentiment,

Des années, je suppose,

Que je ne m’étais senti vivant hors de mon corps,

Ce soupçon d’animalité me réjouit,

Je crois.

Cet exercice me plaît assez,

Finalement.

Cela me donne une voix,

J’imagine qu’on me lit,

Qu’on me raconte,

Qu’on hurle mon esprit,

Devant une foule attentive,

Accrochée à vos lèvres,

Vous qui vociférez mes mots,

Vous me lisez, n’est-ce pas ?

Oh non ne me dites pas,

L’inquiétude vous disais-je,

Laissez-la-moi.

C’est qu’il en faut peu,

Lorsqu'on est privé de tout.

« Vous êtes mieux ici que dehors »

Me direz-vous.

J’entends, et c’est probable.

Au fond de ma cage,

Je ne vois pas les rats dévorer les rats,

Je ne vois pas les rats,

Anéantir leur propre espèce.

Mais je l’ai déjà vu,

Et sachez que cela compte pour l’essentiel,

Vous m’avez seulement épargné le banal.

Et maintenant que vous me laissez,

Toutes vannes ouvertes,

Vider mon esprit,

Maintenant je crois me souvenir,

Me souvenir de ma condition,

De cette crasse particulière,

De cette indécence qui était la mienne.

Lorsque vous m’avez attrapé,

Et sorti des égouts,

J’étais l’essence même,

De ce qui ronge le monde.

Si je ne divague pas,

Que mes souvenirs sont bien réels,

Je n’ai jamais incarné que le pire,

Selon vous j’entends.

Un pur produit des bas-fonds,

Mes griffes auraient lacéré n’importe quoi,

Pour survivre un jour de plus,

Il est vrai.

J’avais entendu parler de vous,

Vous vouliez sauver le monde,
Vous qui le saccagiez bien avant nous,
Les bruits courraient dans nos labyrinthes.

Nous étions de ceux qui avaient abandonné.
Nous usions ce monde,
De toutes nos forces,
Sans gêne jamais.

« Si la fin doit venir,
Elle est la bienvenue ,

Nous serons l’accueillir »

Disions-nous.

Il était trop tard,

Nous en étions convaincus.

« Dans ce cas,
pourquoi tant d’effort à survivre ? ».

Vous me poserez la question,

Je ne vous laisse pas le choix.

La survie tenait du réflexe,

Voilà tout.

Que la fin soit notre horizon le plus proche,

Nous nous en accommodions volontiers,

Mais la mort est un ennemi comme un autre.

Nous nous défendions contre tout,

Tel était l’essentiel de nos comportements,

La défense contre l’agresseur,

L’agression de tout ce qui reste.

Nous travaillions à l’usure,

A l’érosion des uns par les autres,

A la dégradation de toute chose.

La fin pouvait donc bien venir,

Mais notre propre mort,

Notre propre agonie,

Jamais.

Nous vivions d’incohérence,

Mais nous vivions,

Voici qui suffisait à tout justifier,

Au moins pour cette fois.

Il s’agissait de croyances,

Je connais les vôtres.

Si seulement ce que vous appelez Science,

Avait pu avoir un dieu,

Il y aurait eu moins de cages,

Car nul besoin de sauver le monde,

Et pour nous,

Nul besoin de l’achever.

J’avais entendu parler de vous,

Vous disais-je,

Je me retrouve ici.

Cela fait longtemps ?

Comment va le monde ?

Dites-moi.

Vous ne me direz rien,
Ceci n’es pas une lettre,
Il n’y aura pas de réponse,
Ne sachant pas à qui je m’adresse,
Voici l’évidence.
Sachez que j’ai eu le temps,

Le temps de perdre énormément.
Si le propos était celui-ci,
Vous vous en être bien sortis,
Ce qui me constitue à bien changé,

Ma substance,
Jusqu’aux tréfonds de mon être,
 S’est comme écoulée hors de moi,
Comme on assécherait un lac.
Je ne suis plus agressif,
Je n’ai plus peur,
Mes griffes émoussées me gênent,
Je me suis fait à votre cage.
J’étais une toile aux courbes anarchiques,
Dont vous vouliez que les couleurs ne soient plus.
Ainsi accrochée seule dans le noir,
Loin de toute considération,
Vous espériez que la peinture s’en aille,
Qu’elle disparaisse,
Qu’elle n’ait jamais été.
Sachez que je vous félicite.

Je suis inquiet, ennuyé,
Et enfin vierge de ce que je fus.

Modifié par Diane
pas de majuscules dans un titre
  • Merci 1
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