Tout n’est pas si morose

[Ouintenabdel]

Sous des cieux plus cléments,  tant d’enfants, nés coiffés,

Et sur qui, jour et nuit, veillent de bonnes fées,

Mordent à pleines dents dans la vie. Chérubins

Insoucieux planant  dans  des cieux si sereins !

 

Le monde est donc si beau ! Nenni ! Rien n’est moins sûr !

Dans ce monde incertain, la vie est plus que dure

Pour tant d’autres enfants dont les droits sont bafoués.

À longueur de journée, ils battent le pavé

 

En rêvant d’être un jour,  ou princes ou pachas

Ou grands rois.  Ils auraient une belle villa.

Pour l’heure, et sans regret, on fume  l’héroïne,

Souvent on vole aussi, et même on assassine !

 

Ces vils gavroches sont hantés par des démons !

Ces méchants garnements sont encore légion !

Pudiquement ils sont nommés enfants des rues.

Ils sont considérés comme un réel  rebut

 

Dont on se méfie tant. On les craint plus que tout.

Partout ils sont traqués, à Bombay, à Moscou,

À Pékin, à Dakar, à Rio de Janeiro. 

Ils se cachent, le soir, dans l’antre des métros.

 

Des filles, frêles fleurs, vendent souvent leur corps

Avec beaucoup de honte, et avec moult remords.

Pour quelques vilains sous, on  montre ses dessous

Aux couleurs chamarrées. Et souillées jusqu’au cou,

 

En proie à la douleur,  on regagne son toit.

On entend des chiens qui, crocs dehors, aboient.

Dans les hideux taudis on hume des odeurs

Viles tant et si bien qu’on a des haut-le-cœur.

 

Des  rois sont sans couronne et des fleurs sans corolle !

Dans beaucoup de pays sont fermées les écoles

Au nez de ces  gamins minés par le chagrin,

Parias aux lendemains, ô combien incertains.

 

Mais quand même, disons que tout n’est pas morose !

Et même dans la boue de jolies fleurs éclosent !

Et s’élèvent moult voix pour que tous les enfants

De ce monde imparfait vivent joyeusement.

 

Et de Johannesburg  au Caire,  de Manille

À Lima, des millions de garçons et de filles

Se tiennent par la main, dansent la farandole.

Aux quatre coins du globe éclosent des écoles !