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Dimanche matin


Joailes

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Je m'éveille plutôt de bonne humeur ce matin, le soleil tente de se glisser à travers mes paupières, en déposant de petites paillettes sur le piano et sur les livres épars ; je n'ai aucune obligation, quelle joie !

Les bruits qui proviennent du dehors sont différents : plus doux, plus sourds, comme étouffés par des oreillers de plumes, l'oiseau qui chante n'a pas le même son, on dirait qu'il rit.

Je m'étire paresseusement, je bâille plusieurs fois, suis-je un chat ? Je n'ai aucune idée de l'heure et je m'en fous, ça sent le pain grillé, le lait caillé et le café foutu. 

Alors, je sais que c'est dimanche.

Le dimanche n'a jamais été un jour comme les autres jours.

Il pèse sur les villes comme un silence blanc, un silence de neige qui tombe et qui recouvre tout ; c'est un bon jour pour traîner en pyjama et en chaussettes sur le parquet qui craque de toute son arthrose, qui sent la cire et le pot aux roses ; siroter quelques cafés mystérieux aux parfums de Pérou, écouter de la musique, rester soi-même avec soi-même dans cette semi-torpeur et pourquoi pas, se rendormir par petits à-coups et sourire comme un bébé ou un chat à l'appel du lait. 

Je me lève et tire légèrement le rideau.

Non, il n'a pas neigé et les marmottes sont encore là, à emmagasiner du soleil dans leur corps pour dormir doux l'hiver dans leur bouillotte en fourrure. 

J'ai réservé une chambre chez elles de novembre à avril, je verrai bien ce que c'est d'écrire sous terre, y a-t-il ces mêmes dimanches cotonneux ?

J'ai hâte d'hiberner : encore une nouvelle expérience, je ne supporte plus novembre dehors.


 

Il doit y avoir une fanfare … j'entends les tambours.

Ah non, il y a quelqu'un qui essaie de pénétrer chez moi.

C'est ma mère.

Lorsque j'ouvre la porte, un éclair fulgurant me transperce de bas en haut et de part en part.

Dimanche 8 septembre : anniversaire de mon frère.

Ils viennent tous chez moi pour le repas, une fois par an, à treize heures pétantes.

Comment ai-je pu oublier, dans la fièvre d'un samedi soir, cette invitation capitale pour nos relations de famille ?

Une migraine m'attrape les tempes et les broie dans son étau.

Vite une douche, c'est pas le moment de penser aux palmiers et aux noix de coco, je prends le gel de la semaine, cactus et vas-y Brutus, c'est radical avec le gant de crin.

 

Bon, ma mère empoigne le ménage, tout va aller très vite à présent.

Je cherche à une vitesse qui m'étonne moi-même, le numéro d'un ami dans mon répertoire d'urgence.

Je crie, en me couvrant bêtement une oreille comme si j'allais chanter une polyphonie, mais surtout pour échapper aux cris de l'aspirateur,

« sauve-moi, je t'en supplie ! Fais-moi livrer un repas pour treize personnes, d'ici un quart d'heure, question de vie ou de mort »

C'est un ami, je l'ai dit.

Il m'a sauvé la vie.

J'ai fait un beau bouquet de fleurs des champs, tandis que sa camionnette se garait à l'arrière de la cuisine, heureusement formellement interdite au public.


 

A midi, on était même en avance sur le canon*, on s'est retrouvées, ma mère et moi, sur le sofa.

J'enroulai tranquillement une mèche de cheveux autour d'un de mes doigts, comme j'aime bien faire quand je n'ai rien à dire, lorsqu'elle me dit, avec quelque perfidie :

- mais dis-moi, il n'y a pas d'odeur de cuisine … tu n'avais pas oublié, j'espère …

- Non, maman, j'ai cuisiné hier soir jusqu'à très tard.

Oh non, je n'ai rien oublié … je me souviens de ces dimanches»

(J.E. Petites histoires ordinaires -)

  •  

    * à Nice, le canon retentit à midi.


 

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