~ Les commentaires sur les sujets sont uniquement visibles des membres de notre communauté ~
Rechercher dans
  • Plus d’options…
Rechercher les résultats qui contiennent…
Rechercher les résultats dans…

Doit contenir au moins 3 caractères.

Aller au contenu

Une très grande fenêtre


Joailes

Messages recommandés

Les vaches aux yeux larmoyants ne regardent plus passer les trains depuis l'autoroute mais les lézards persistent à s'avachir sur les murs brûlants et la mort rôde sur l'étang où la grenouille frivole chante encore, sans souci du temps

dans la nuit d'améthyste le vent souffle et fait trembler les ombres qui deviennent ce que l'on veut, comme quand on regarde les nuages dans un ciel azur et qu'on imagine des choses, des anges, des éléphants ou des chiens, des ours, des fées ou des sorcières, c'est selon l'intensité du soleil. 

Cette fenêtre est si grande * qu'on peut s'ouvrir avec elle, les bras tendus et embrasser bien des choses à la ronde, du matin au soir tout est si changeant qu'on peut, un soir de nuit noire, s'envoler dans sa bouche béante et puis le regretter, mais c'est trop tard, après un beau matin d'amour avoir envie de la fermer et de tirer les rideaux.

Parfois, on n'est pas là pour parler, le vent qui s'est levé a rouvert cette fenêtre et les rideaux se sont envolés loin, très loin, plus haut encore que des cerfs-volants, si j'avais voulu les rattraper j'aurais sauté, pas volé, j'ai réfléchi, mes rideaux auraient été foutus et moi aussi alors je n'ai pas sauté et j'ai fermé les volets à cause des chauves souris à l'envers

les pauvres vaches aux yeux larmoyants ont vu passer un train, stupéfaites, elles se sont toutes mises à genoux en chantant en patois un vieil hymne de leurs grands-mères qui avaient vu passer tant de trains,  les lézards sont interdits sur les murs aujourd'hui et la mort a emporté la grenouille qui ne chante plus depuis ses soucis

dans la nuit d'améthyste le vent souffle et fait trembler les ombres qui deviennent ce que l'on veut et je ne regrette pas que les rideaux se soient envolés à ma place, même si il y avait largement de la place pour deux dans ces courants d'air j'avais encore à vivre

tous les parfums m'arrivent, presque insolents dans leur puissance, l'été a ceci de charmant qu'il multiplie les odeurs je m'en suis méfiée dès le début, et j'ai refusé la cellule 12, pourtant coquette, mais au-dessus des poubelles. 

Je vous vois me lire, je vous vouvoie, je suis émue et vous , que voyez-vous ?

Une fenêtre ouverte ou fermée ?

J'ai été reçue haut la main à mon examen parce que le jury n'a rien compris et voulait en finir, c'était le début des vacances et, tant qu'à y rester enfermée, j'avais choisi la cellule 18,  la plus belle, forcément, celle qui a une très grande fenêtre qui donne sur les jardins. 

Personne n'a su répondre à ma question mais je savais bien qu'il me faudrait répondre aux leurres. 

(J.E. Petites histoires ordinaires – juillet 2019)

 

* un ami très lettré me signale que ma grande fenêtre s'appelle une baie vitrée. Ça fait chic, certes, mais je préfère ma grande fenêtre.

Par ailleurs il vient de glisser par la fenêtre, mais je l'avais étranglé avant, alors maintenant il s'en fout que ce soit une baie vitrée ou pas.

C'est toujours pareil, les entretiens avec les éditeurs je ne supporte pas.

J'aime pas qu'on dise du mal de ma grande fenêtre. Il aurait pu, à la rigueur, la fermer. 

Modifié par Joailes
  • Merci 1
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

×
×
  • Créer...