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La muse, le poète et le jardin


Joailes

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Merci à @Marc Hiver pour son titre qui fut ma source d'inspiration. Ma muse, en quelque sorte ! 

 

Il était une fois une muse peu sérieuse qui s'amusait à batifoler parmi les fleurs dans les jardins. Elle n'était pas bégueule, mais n'aimait guère les grandes gueules.

De surcroît, elle était un peu prétentieuse.

Un poète en recherche la suivait depuis quelques heures. Elle avait remarqué son manège.

Ses grands chevaux de bois avaient de l'allure, certes, mais elle n'aimait pas du tout qu'on lui force la main, aussi se cachait-elle par instants derrière les buissons et riait de l'air désappointé du poète dont la plume restait bêtement en suspens.

La muse s'amuse d'un rien, c'est bien connu, pourtant elle a son caractère, elle n'aime pas les courants d'air et encore moins les jardins mal entretenus. Celui-ci était de ceux-là.

Elle se fâcha plusieurs fois contre des herbes folles et même contre un pauvre coquelicot qui,faute d'attention, avait perdu ses pétales et arborait un cœur poilu tout nu et tout noir.

Le coquelicot, très sensible, se mit à pleurer.

Le poète, lassé de chercher la muse, recueillit le coquelicot, le colla sur sa feuille et lui dessina de magnifiques pétales avec son crayon rouge, tout autour de son cœur poilu et tout noir.

Le jardin en fut tout heureux, les herbes folles riaient comme des … folles.

La muse, intriguée par ce manège cette fois-ci, revint sur ses pas et s'approcha du poète.

Avant même qu 'elle n'ait pu ouvrir la bouche, celui-ci la chassa d'un revers de la main, comme on chasserait une mouche indiscrète et incommodante.

D'autres muses s'étaient attroupées autour du dessin du poète, en le suppliant d'en faire encore pour elles, ce qu'il ne refusa point.

Le coquelicot gémissait de bonheur, tout frétillant sur sa tige.

En échange, elles chuchotèrent des mots à l'oreille du poète, qui, comblé, écrivit ses plus beaux vers.

La muse éconduite, quant à elle, fut fort triste.

Elle se dit, mais un peu tardivement, que ce poète là aurait pu être son amant.

Elle l'avait trouvé ennuyeux, de loin ; de près, elle le trouva charmant et même attirant.

Hélas, il était bien trop tard pour chercher à le séduire.

D'ailleurs, le coquelicot et les herbes folles, très rancuniers, la chassèrent vigoureusement.

Le poète acheta le jardin dès qu'il devint célèbre et en fit le plus beau des jardins où s'ébattaient, heureux, les coquelicots, les herbes folles et les muses aériennes qui ne se prenaient pas la tête, ni la sienne d'ailleurs.

 

Moralité : même quand on est muse, on ne doit pas se moquer d'un poète un peu distrait qui a la plume en l'air, encore moins d'un méconnu qui gagne beaucoup à être connu.

(J.E. Petites histoires ordinaires – Juin 2019)

 

 

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