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Joailes

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Plus qu'une rue mal éclairée à traverser

j'arrive enfin devant le portail en fer forgé

qui est sorti de ses gonds depuis longtemps

ô cette odeur de moisi et de rouille !

 

Ce jardin vivant dans l'obscurité

m'accueille de toutes ses lucioles

j'enlève mes chaussures souillées

pour marcher sur son tapis d'herbes folles

une lucarne est toujours allumée

toute petite et sous les tuiles,

comme un œil bienveillant.

 

J'enfile mes lunettes de lune

pour avancer vers ses bras

 

derrière moi toutes les rues s'effondrent

comme des châteaux de cartes

comme des dominos s'écroulent

à la chaîne

alors j'entre dans la petite maison

je ferme la porte

et jette la clé au loin

dans le jardin vivant, obscur.

 

Une longue silhouette noire

ira la ramasser,

les lauriers sont occupés,

mais elle se noiera dans la rivière

sans pousser ouf

avec un petit plouf.

 

Assise sur un pouf,

par la lucarne, au milieu de la nuit,

je vois les morts vivants

qui m'attendent, le souffle court

et rien, plus rien autour

que des gémissements, du sang

et le cliquetis lancinant de leurs chaînes …

 

Ma mère entre dans la chambre

sais-tu l'heure qu'il est

me dit-elle, l'air courroucé,

et elle éteint la télé.

 

FIN

(pour ceux qui aiment le court, inutile de lire la suite)

 

 

/ …

 

Je vais essayer de dormir avec Audrey Naline,

ma cousine, qui aime les films d'horreur 

qui mange des pralines

à toute heure et qui ronfle comme un cyclomoteur.

 

Comme elle prend toute la place dans le lit,

je retourne sur le pouf

et, en douce, je rallume la télé.

 

Revoilà le jardin vivant et ses lucioles

un œil bienveillant sort de l'écran

vient me taper sur l'épaule

et m'entraîne loin de ma cousine Audrey

 

je savais bien qu'ils allaient m'emmener

loin de ce manoir

dès que ma mère et Audrey dormiraient

au cimetière

en ronflant à trois heures du matin.

Elles sont cyprès … je suis si loin …

 

FIN 

 

(J.E. Petites histoires ordinaires - )

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