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Hésitations matinales


Papy Adgio

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Le fil est un conspirateur singulier qui affiche à la naissance une bobine joyeuse et colorée où brille la malice.

Plus tard, il croise, recroise, entrecroise d’autres congénères, il trame des avenirs, enchaîne des itinéraires, ourdit des espoirs parfois espiègles.

Le résultat de cet assemblage repose ensuite sur un porte-manteau, offert aux regards, aux injonctions, aux sarcasmes, aux exclamations, aux gloussements ou au glissement du pouce sur l’index.

C’est un revers de main qui explore sa candeur, sa douceur ou sa rudesse.

C’est un retournement d’étiquette qui scelle deux amitiés sur le seuil de la bonne affaire.

 

Alors, à l’aube des promesses, éclot l’alchimie de la robe.

 

Que naisse un matin mutin dans l’intimité de la chambre et le choix de s’en vêtir vainc sans coup férir…

L’esprit délaisse les galeries du chemin de fil unisexe. Il oublie la vulgarité d’une fermeture éclair vaguement posée sur la cambrure des reins.

S’insinue lentement le désir d’esquisser, de susciter, de surprendre, d’entreprendre, de conquérir.

La musique svelte du cintre sur un axe métallique emplit la pièce. Des phalanges dubitatives pianotent un menuet sur l’acier du portant.

Sur un soupir, s’extrait un vêtement qui s’étale sur le lit. Sur un silence, un autre suit.

De croche en double croche, d’autres atterrissent sur la couette.

Débute alors la valse

la valse hésitation bien sûr

ses temps de moue devant le miroir, ses mesures de retraite dans l’absence de l’armoire, ses allers ses retours, ses nouveaux allers ses nouveaux retours, ses examens de rattrapage, ses éliminations irrémédiables, puis le choix,

soudain, sec, net et définitif.

Sans hâte, la robe élue accueille des bras frêles, un cou tendu, un visage prêt à séduire. La peau des épaules perle au plaisir du contact de l’étoffe.

Le tissu étincelle de mille éclats rieurs, les fibres se plissent, se frôlent, se caressent…Elles attendent, joueuses, que les doigts qui les pincent libèrent leur chute.

Le dos se soumet au souffle de la brise légère du déplacement ténu, la poitrine se love délicatement dans l’espoir de supputations intellectuelles, les reins s’estompent dans l’éclat de la divination, les fesses s’offrent à l’illusion…

Parfois, à l’illusoire…

L’ourlet, discret, s’immobilise à mi-cuisse où s’ébauche une musculature timide mais présente. Le décor est planté, tout de suggestion, de retenue.

La robe peut alors paraître au grand jour.

Nos regards désespérément masculins n’auront plus qu’à suivre les méandres du tissu, les routes qu’ils suscitent, les trajectoires qu’ils indiquent. Chaque mouvement inventera un voyage.

 

Ce matin, mutine, ma libraire a revêtu une simple robe imprimée de motifs géométriques noirs sur fond jaune qui lui sied à merveille.

Elle va, elle vient, se dresse sur la pointe de pieds pour saisir un volume sur l’étagère du haut.

Lentement, le tissu se tend et dans un friselis à peine audible la robe se soulève de quelques modestes centimètres…

 

Je soupire et je songe à l’infinité de possibles que cette modestie éveille…

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