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Le chien et la pendule


Joailes

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Le quatorzième jour d'avril allant au marché je rencontrai Cosette sur la place et nous taillâmes une bavette avec le boucher ; je fis deux emplettes - un peu superflues, je l'avoue. - et humai  les pots de basilic et les violettes fragiles à peine écloses j'en oubliai les oignons. 

Ça me mit en retard à la maison ;  je ne m'habituai pas aux heures dites, j'étais donc toujours en retard, sans doute. 

 Je courais comme si j'étais en faute d'avoir joui de mon temps, sans même prendre le temps de saluer Bernard.

 

Il était là, tapi et quand je suis entrée il m'a tellement postillonné dessus en hurlant que j'avais quatorze minutes de retard que j'ai dû exiger un test heureusement il l'a passé avec mention très bien il faut dire qu'il était bien calé ; ça m'a coûté très cher en vétérinaire et puis en comportementaliste,  tout ça n'était pas sur ma liste de courses au marché. 

Quand j'ai acheté ce chien c'est parce qu'il ne parlait pas, il avait juste des yeux bavards,   mais depuis que je lui ai donné des piles, il ouvre sa gueule en grand pour me donner l'heure il aboie toutes les cinq minutes avec des voix différentes, tantôt berger des Pyrénées, tantôt caniche frustré.

Au quart , le batard se fait pleurnichard.

A la demi, l'aiguille pique les fesses d'un teckel froussard qui n'a pas connu la forêt et à pile poil celles du yorkshire qui a vu une ombre - sans savoir que c'est son noeud-noeud à sa mémère qui pend, il nous fait le lion, croyant voir une crinière. -

Pourquoi ai-je acheté cette pendule ?

Elle a dû me faire les yeux doux ou peut-être était-ce le forain ?

Ah je ne sais plus … je me souviens d'un épagneul qui m'avait imposé d'un seul regard de lui acheter des croquettes, il y a fort longtemps de cela.

 

Pourtant, bien qu'échaudée, je ne crains pas l'eau froide.

Trois jours plus tard, jour de marché, je l'ai emmenée dans mon cabas les gens croyaient que je promenais mes chiens et les chiens du quartier me suivaient en rang serré, croyant que je promenais mes gens,  tandis que je me dirigeais vers l'étal de mon boucher préféré, féru de métal.

Malgré le bruit de la boutique, les chiens se sont fait repérer. 

J'ai bifurqué vers le supermarché, j'ai fait le plein de boulettes et de croquettes.

En rentrant à la maison, j'ai remis la pendule à sa place.

On s'est souri tous les trois, de connivence. 

Chacun ferait des concessions. 

Il y a quatorze ans de cela. 

Bernard est d'accord avec moi cette pendule a un certain sex-appeal depuis qu'elle ne mange plus de piles. 

Parfois, j'aboie et on rigole ça nous rappelle le temps passé. 

 

(joailes – avril 2021)

 

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