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Le nécrophile amoureux


Marc Hiver

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Je n'ai jamais été malade et cette nécrophilie caractéristique de mes nerfs et de mon cerveau, aux dires des psychiatres éminents de l’hôpital Sainte-Anne, prouve en fait l'extraordinaire finesse des facultés dont m'a pourvu la nature. Depuis que je suis à nouveau enfermé derrière ces murs, je peux me louer d'être tombé dans les mains de ce jeune interne qui a enfin rendu justice à mes intuitions les plus tenaces. Voici un homme dont le caractère énergique et pénétrant ne s'embarrasse pas des préjugés de ses confrères.

 

Tout de go, il m'a déclaré : « Ce que vous ressentez, je l'admets volontiers ». Il a même précisé : « Une aussi haute considération des morts, à une époque où chacun s'entend à les enterrer définitivement, dénote une âme bien trempée et une vie spirituelle complexe. »

 

Je lui ai raconté quelques-uns des épisodes qui, je le sentais, dégoûtaient ses prédécesseurs. À aucun moment il n’a froncé les sourcils, baissé les yeux ou émis un jugement quelconque. Il m'a écouté attentivement et quand j'ai eu terminé, il m'a lancé :

 

— « Mon cher Henri — vous me permettez de vous appeler Henri ? — notre problème est tout simple ; vous ne souffrez d'aucun trouble, ne jouons pas sur les mots, mental. Mais, comment dire, si vos impressions sont indéniables, si ce que vous pensez s'avère, vous ne l'exprimez pas correctement. Pour tout dire, notre problème est un problème de communication. »

 

Aussitôt je lui ai demandé s'il se moquait de moi, s'il acceptait vraiment l'idée que moi, Henri, j'étais sain d'esprit et pourquoi il ne me délivrait pas une autorisation de sortie sur le champ ? Il m'a regardé droit dans les yeux :

 

— « Les autres ne saisissent pas la... noblesse de vos sentiments. En un mot, vous leur faites peur. Et pourquoi vous leur faites peur ? Parce que vous ne vous expliquez pas comme vous venez de le faire si simplement il y a quelques instants. »

 

J'ai voulu tester la sincérité de ses propos : croyait-il qu'un jour ces autres imagineraient la violence de mon idylle avec le cadavre de ma belle charcutière ?

 

— « Oui, m'a-t-il répondu dans son style franc et direct, je me porte garant de leur ressenti s'ils percevaient la beauté, la tendresse cachée derrière ce geste d'amour paradoxal. »

 

— « Ils comprendraient mon désespoir quand j'ai vu peu après notre lune de miel, un an après son enterrement, ma maîtresse se disloquer dans mes bras et ses yeux glauques et révulsés sortir de leurs orbites ? »

 

À suivre...

 

Modifié par Marc Hiver
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